Jour de messe chez les hommes de labours.
Le village est pauvre, le clocher humble, l'église sombre, la piété profonde. Émile l'enfant de choeur doit chanter comme tous les dimanches. C'est un fils de fermier, élevé modestement. Un petit bossu né il y a une douzaine d'années, pris en pitié par le prêtre de la paroisse qui lui a inculqué quelques rudiments de chorale, histoire de le soustraire au climat déprimant de la ferme familiale. En peu de temps l'infirme s'est révélé plutôt doué, et de dimanche en dimanche les ouailles assistent à ses progrès.
Mais c'est le moment de chanter pour l'enfant de choeur.
Émile vêtu de son aube s'avance devant l'assistance. Ainsi affublé de blanc, il n'en paraît que plus laid, gauche et contrefait. L'harmonium mal accordé émet les premières notes. Le petit chanteur aux traits ingrats lève les yeux, gonfle la poitrine, ouvre la bouche...
Une voix de cristal s'élève, emplissant pierres et âmes.
Dans l'église tout se fige. Le chant du séraphin tordu résonne dans chaque oreille, et nulle prière n'est plus belle que cet écho. La voix est bouleversante. C'est une onde pure, une flamme bleue. Tout est transfiguré sous le chant du petit disgracié. Très vite l'ange transparaît à travers sa chrysalide débile.
Debout face aux villageois, la face éclairée par quelque lueur vacillante d'un cierge usé, Émile le petit bossu soudain devient beau, solennel, plein de majesté. Un air de gravité qu'on ne lui connaît habituellement pas rend méconnaissable son visage. Absorbé par son chant, il semble se concerter avec des êtres invisibles.
Sa voix qui monte jusqu'aux hauteurs sacrées embellit chaque chose : l'église crasseuse, les mines burinées, les vêtements misérables, tout est oublié. L'église sans éclat n'est plus qu'un autel dédié à la Beauté. Les fidèles sous l'enchantement n'ont plus d'yeux que pour ce petit bossu qui leur rappelle que les vraies richesses du monde sont au-dessus de leurs têtes et non sous leurs pieds.
Le chant terminé, règne dans l'église un grand silence fervent. Puis, peu à peu le chanteur redescend de ses nues. Claudiquant de façon grotesque, Émile rejoint alors sa place d'enfant de choeur et va s'asseoir derrière le prêtre. Son visage est redevenu celui du petit misérable de tous les jours.
Mais dans les âmes, le miracle de la Beauté a opéré.
VOIR LA VIDEO :
http://www.dailymotion.com/video/xx94sn_le-choriste-raphael-zacharie-de-izarra_news#.UQ668KXRvns
Le village est pauvre, le clocher humble, l'église sombre, la piété profonde. Émile l'enfant de choeur doit chanter comme tous les dimanches. C'est un fils de fermier, élevé modestement. Un petit bossu né il y a une douzaine d'années, pris en pitié par le prêtre de la paroisse qui lui a inculqué quelques rudiments de chorale, histoire de le soustraire au climat déprimant de la ferme familiale. En peu de temps l'infirme s'est révélé plutôt doué, et de dimanche en dimanche les ouailles assistent à ses progrès.
Mais c'est le moment de chanter pour l'enfant de choeur.
Émile vêtu de son aube s'avance devant l'assistance. Ainsi affublé de blanc, il n'en paraît que plus laid, gauche et contrefait. L'harmonium mal accordé émet les premières notes. Le petit chanteur aux traits ingrats lève les yeux, gonfle la poitrine, ouvre la bouche...
Une voix de cristal s'élève, emplissant pierres et âmes.
Dans l'église tout se fige. Le chant du séraphin tordu résonne dans chaque oreille, et nulle prière n'est plus belle que cet écho. La voix est bouleversante. C'est une onde pure, une flamme bleue. Tout est transfiguré sous le chant du petit disgracié. Très vite l'ange transparaît à travers sa chrysalide débile.
Debout face aux villageois, la face éclairée par quelque lueur vacillante d'un cierge usé, Émile le petit bossu soudain devient beau, solennel, plein de majesté. Un air de gravité qu'on ne lui connaît habituellement pas rend méconnaissable son visage. Absorbé par son chant, il semble se concerter avec des êtres invisibles.
Sa voix qui monte jusqu'aux hauteurs sacrées embellit chaque chose : l'église crasseuse, les mines burinées, les vêtements misérables, tout est oublié. L'église sans éclat n'est plus qu'un autel dédié à la Beauté. Les fidèles sous l'enchantement n'ont plus d'yeux que pour ce petit bossu qui leur rappelle que les vraies richesses du monde sont au-dessus de leurs têtes et non sous leurs pieds.
Le chant terminé, règne dans l'église un grand silence fervent. Puis, peu à peu le chanteur redescend de ses nues. Claudiquant de façon grotesque, Émile rejoint alors sa place d'enfant de choeur et va s'asseoir derrière le prêtre. Son visage est redevenu celui du petit misérable de tous les jours.
Mais dans les âmes, le miracle de la Beauté a opéré.
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http://www.dailymotion.com/video/xx94sn_le-choriste-raphael-zacharie-de-izarra_news#.UQ668KXRvns
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